top of page
Rechercher

La fiscalité des cryptomonnaies au Luxembourg


La fiscalité des cryptomonnaies au Luxembourg

En tant que place financière centrale de l’économie mondiale et européenne, le Luxembourg offre un cadre fiscal très attrayant pour les entreprises, y compris celles opérant dans le secteur des cryptomonnaies.


Le régime fiscal attractif applicable à ces entités vise à promouvoir à la fois l'innovation au Grand-Duché en attirant l’implantation locale d’acteurs internationaux du secteur, tout en leur assurant un cadre réglementaire, social et politique stable qui bénéficie également aux finances publiques.

Pays pionnier en la matière, la circulaire luxembourgeoise L.I.R. n° 14/5 – 99/3 – 99bis/3 du directeur des contributions du 26 juillet 2018 relative au régime fiscal applicable aux opérations sur les monnaies virtuelles consacrait déjà une définition propre des monnaies et actifs virtuels en octroyant le statut de « bien meuble incorporel » aux cryptomonnaies.


Et l’une des premières conséquences de ce statut que l’administration fiscale a tirées est que l’administration de l’enregistrement et des domaines exempte de TVA toutes les opérations consistant en l’échange de cryptomonnaies contre des devises traditionnelles, soit l’achat et la revente de cryptoactifs.


La loi du 25 mars 2020 transposant la 5ème directive anti-blanchiment de l'Union Européenne s’est saisie de la matière des cryptomonnaies et leur accorde une définition légale.

En matière de fiscalité, il faut distinguer la situation des particuliers détenant des cryptomonnaies de celle des entreprises opérant dans le secteur comme les plateformes d’échanges et de gestion de portefeuille de devises numériques ou encore les sociétés d’investissements engagées dans des opérations en cryptomonnaies.



L’intégration des sociétés d’investissement en cryptomonnaies dans le régime fiscal existant


En matière d'imposition, les dispositions prévues par la législation fiscale s'appliquent en fonction de la nature du revenu concerné. Et pour l’administration fiscale luxembourgeoise, l'utilisation d'une cryptomonnaie comme moyen de paiement n'affecte pas la nature fiscale du revenu.


En tant que sociétés de capitaux, les sociétés opérant dans les opérations d’investissement en cryptomonnaies ou les plateformes d’échange et de gestion de portefeuille de devises numériques, sont imposées sur les bénéfices réalisés, soit l’impôt sur les sociétés (ou impôt sur le revenu des collectivités), la contribution au fonds pour l’emploi qui est fixé à 7% de l’impôt sur les sociétés, et une taxe commerciale communale qui est fixée par exemple à 6,75% à Luxembourg-Ville. Ainsi, par application de la nouvelle réforme de la loi du 24 décembre 2020 créant de nouvelles baisses d’imposition des sociétés pour l’année fiscale 2025, les sociétés de cryptomonnaies seront imposées au taux standard de 16% sur les bénéfices excédant 200.000 euros. Pour les sociétés de cryptomonnaies ayant un bénéfice se situant entre 175 000 euros à 200.000 euros, un forfait unique de 24.500 euros plus 30% du revenu dépassant 175 000 euros est appliqué. Un taux de taux réduit de 14% pour les sociétés réalisant un bénéfice de moins de 175.000 euros. 


Globalement, une société de cryptomonnaies établie à Luxembourg-Ville aura un taux d’imposition effective de 23,87% pour l’année 2025. C’est un point de pourcentage en moins depuis la réforme du 20 décembre 2024.


La situation fiscale des sociétés de cryptomonnaies peut être résumée ainsi :


crypto fiscalite

En plus des baisses d’impôts de la récente réforme, les sociétés de cryptomonnaies peuvent bénéficier du cadre particulièrement bénéfique de certaines formes sociales offertes par le Luxembourg. C’est le cas par exemple de la Société De Participations Financières (SOPARFI).


Outre la possibilité offerte de faire cohabiter simultanément des activités commerciales et des activités financières au sein d’une même structure, la SOPARFI offre l’avantage d’une exonération d’impôts sur l’activité financière, notamment sur les dividendes reçus de filiales, et sur des plus-values réalisées sur la cession de participations, lorsque les participations sont détenues pendant au moins 12 mois, et sont d’une valeur d’au moins 10% du capital de la filiale ou d’une valeur équivalent au moins 1,2 millions d’euros.


En principe, les distributions de dividendes effectuées par une SOPARFI au profit de ses actionnaires sont soumises à une retenue d’impôt à la source au taux de 15 %. Toutefois, en vertu de l’article 166 (2), de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ces distributions en sont exonérées si les conditions suivantes sont remplies :

  • La SOPARFI a détenu chaque participation pendant au moins 12 mois ininterrompus ; 

  • Le taux de la participation est équivalent à 10% au moins du capital souscrit de la filiale, ou la participation est au moins égale à 1.200.000.-€ ; 

  • La filiale est une société de capitaux pleinement imposable, sauf convention fiscale d’exonération.


crypto fiscalite

La création d’un régime spécial très avantageux pour les particuliers détenteurs de cryptomonnaies

Les particuliers détenant des cryptomonnaies sont quant à eux soumis à une imposition différente selon qu'ils réalisent des plus-values après les avoir détenues pendant une période donnée, ou qu'ils s'engagent dans des activités commerciales.


Dans le premier cas, les plus-values réalisées sont considérées comme étant des revenus nets divers dans le cadre de la gestion d’un patrimoine privé, et peuvent bénéficier d’une exonération d’impôt.

Selon l’article 99 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, les plus-values réalisées sur les cryptomonnaies détenues pendant plus de 6 mois, et d’un montant allant jusqu’à 500 € sont purement exonérées d’impôts.


Pour les plus-values supérieures à 500 € ou sur des cryptoactifs détenus pendant une période inférieure à 6 mois, le régime d’imposition de droit commun d’impôt sur le revenu s’applique [au taux global], avec ses différentes tranches allant jusqu’à 42% pour les revenus supérieurs à 234 870 depuis la réforme de la loi du 20 décembre 2024 pour l’année fiscale 2025.


crypto fiscalite
Sources : Administration des contributions directes, « Barèmes de l’impôt sur le revenu, les salaires, les rémunérations non périodiques et les pensions » et «Tarif de base applicable aux personnes physiques (impôt sur le revenu)» Janvier 2025 – Martin Condrotte Avocats

Les revenus des particuliers détenant des cryptomonnaies réalisés dans le cadre d’une activité dite commerciale ou « trading intensif » ou de « minage » sont imposés différemment.


Selon la circulaire du 26 juillet 2018, ces revenus sont considérés comme des bénéfices commerciaux et sont soumis à l’impôt sur le revenu selon le barème progressif et aux cotisations sociales.


Ces revenus sont considérés comme étant un bénéfice commercial lorsque les conditions de l’article 14§1 de la loi modifiée de l’impôt sur le revenu sont remplies à savoir s’il y a une « activité indépendante à but de lucre exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale, lorsque ladite activité ne forme ni une exploitation agricole ou forestière ni l’exercice d’une profession libérale ». 


L’administration analyse les situations au cas par cas pour distinguer une situation de gestion de patrimoine privé d’une activité commerciale, et rappelle qu’elle se fonde sur un faisceau d’indices parmi lesquels l’on retrouve la fréquence et le volume des transactions, l’intention de spéculation, et l’utilisation ou non d’outils et d’infracteurs professionnels de cryptomonnaies, etc.


Les revenus des particuliers détenant des cryptomonnaies réalisés dans le cadre d’une activité dite commerciale ou « trading intensif » ou de « minage » sont ainsi imposés comme des bénéfices commerciaux des sociétés.



Un cadre fiscal en perpétuelle adaptation visant à renforcer son attractivité


Du fait du caractère émergent du secteur des monnaies virtuelles et du dynamisme propre à la technologie des blockchains, le cadre règlementaire de la matière est en évolution constante tant elle doit s’adapter avec le progrès technologique. Il en va ainsi de la fiscalité des cryptomonnaies qui reste encore en partie inexplorée.


Effectivement, le secteur des cryptomonnaies comporte et crée en permanence différentes formes de revenus. Par exemple, certaines plateformes d’échanges de cryptomonnaies fidélisent leurs utilisateurs par différentes formes de récompenses comme les airdrops (don gratuit en cryptomonnaies par la plateforme), le staking, le yield farming. Ces revenus qui peuvent être assimilés à des revenus de capitaux imposables ne font pas encore l’objet d’une clarification de leur traitement fiscal par l’administration.


En outre, le cadre règlementaire communautaire et international évolue en même temps que les progrès de la technologie des cryptomonnaies et influence directement le Luxembourg, membre actif de plusieurs organisations économiques internationales qui ont vocation à encadrer la fiscalité et les activités des cryptomonnaies au niveau international à l’instar de l’UE ou l’OCDE.


Ainsi, l’application du règlement MiCA (Markets in Crypto-Assets) entré en vigueur le 29 juin 2023 et de la directive 2023/2226 DAC8 du 17 octobre 2023 qui portent respectivement sur l'émission et la négociation de cryptoactifs et sur la coopération et le les obligations déclaratives pour les détenteurs de cryptomonnaies ne manquera pas de faire évoluer le cadre législatif luxembourgeois en matière de cryptomonnaies.


Au regard de l’importance des enjeux juridiques, économiques et politiques — en particulier ceux liés à la lutte contre la fraude fiscale —, l’harmonisation des règles encadrant l’émission et la négociation des cryptoactifs pourrait bien constituer un terrain favorable à l’émergence d’une harmonisation fiscale en la matière.



  1. La France n’a eu sa première législation fiscale sur les cryptomonnaies qu’à partir de la loi de finances pour 2019, adoptée le 28 décembre 2018 (article 41 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019)

  2. https://impotsdirects.public.lu/dam-assets/fr/legislation/legi18/circulaireLIR14-5-99-3-99bis-3du26072018.pdf 

  3. Article 1er §8, Loi du 25 mars 2020 portant modification de : 1° la loi modifiée du 12 novembre 2004 relative à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme : « Par « monnaie virtuelle » au sens de la présente loi, est désignée une représentation numérique d’une valeur qui n’est émise ou garantie ni par une banque centrale ni par une autorité publique, qui n’est pas nécessairement liée non plus à une monnaie établie légalement et qui ne possède pas le statut juridique de monnaie ou d’argent, mais qui est acceptée comme moyen d’échange par des personnes et qui peut être transférée, stockée et échangée par voie digitale. »

  4.  Article 174 nouveau de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu

  5.  Article 166 de la Loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu

  6.  Le staking est une méthode permettant de gagner des récompenses (en cryptomonnaies ou en argent) en déposant des cryptomonnaies à contribution sur un réseau blockchain pendant une période définie (Coinbase.com)

  7.  Le yield farming consiste à placer des actifs en cryptomonnaie dans un pool de liquidités ou sur une autre plateforme de finance décentralisée afin de générer un rendement plus élevé (Investopedia.com)

  8.  Dans son rapport « Fiscalité des monnaies virtuelles : Panorama des traitements fiscaux et des sujets émergents de politique fiscale » du 12 octobre 2020, l’OCDE présente des recommandations clés en matière de politique fiscale et offre une vue d'ensemble du traitement fiscal des monnaies virtuelles dans différents pays, en abordant les impôts sur le revenu, la consommation et le patrimoine

  9. Règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs

  10.  Directive (UE) 2023/2226 du Conseil du 17 octobre 2023 modifiant la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal


 
 
 
bottom of page